Le manque de sensibilisation quant au fléau de la contrefaçon fait que beaucoup d’internautes se jettent sur des produits faciles à acheter et très attirants par leur rapport qualité-prix. Il n’en reste pas moins que ces mêmes consommateurs alimentent le nouvel eldorado du crime organisé.
Sans aucun doute, l’année 2009 aura marqué une évolution sans précédent en ce qui concerne le marché de la contrefaçon horlogère. En temps de crise, il n’est pas si paradoxal d’enregistrer une baisse du chiffre d’affaires des grandes marques d’un côté, et de l’autre une hausse de celui du marché de la contrefaçon. La demande pour des produits originaux est certes toujours bien présente mais les moyens pour les acquérir, eux, le sont nettement moins. En outre, on peut noter que les principaux produits touchés par la crise sont les montres haut de gamme dont les prix s’étendent de € 6.000 à plus de € 50.000. Les plus chères d’entre elles sont principalement destinées à des collectionneurs qui, bien que passionnés par la Haute Horlogerie, n’en sont pas moins des investisseurs avertis. Pour ce qui est du marché du faux, les prix ne sont en aucun cas sujets à de tels écarts et leurs variations sont davantage liées à la qualité de fabrication des matériaux. Tout au plus, pour une montre contrefaite de « qualité », le « consommateur » devra dépenser entre € 600 et € 700.
Notons ici un autre point important concernant les produits contrefaits : l’importance des mouvements. Si ces derniers étaient totalement négligés il y a à peine deux ans par les contrefacteurs (faux mouvements ETA de mauvaise qualité), il semble bien qu’aujourd’hui, ils soient devenus une priorité. De plus en plus de marques ont effectivement « ouvert le capot » de leurs nouveaux modèles avec pour objectif de permettre au consommateur d’apprécier la qualité du moteur. Les fabricants de contrefaçons ont de leur côté bien noté cette évolution et ont très vite compris que le consommateur appréciait ce type de détail. C’est ainsi qu’aujourd’hui, on commence à voir des fausses montres équipées de mouvements dont la qualité s’améliore de façon alarmante. (Lire le premier encadré)
Des actions sans réel impact
De plus, le manque de sensibilisation quant au fléau de la contrefaçon a fait que beaucoup d’internautes se sont jetés sur ces produits faciles à acheter et des plus attirants par leur rapport qualité/prix. Il n’en reste pas moins que malgré les apparences, ces mêmes consommateurs ne font qu’alimenter le nouvel eldorado du crime organisé : le délit quasi sans risque. C’est précisément ce que l’on entend par manque de sensibilisation. Il est très facile pour un consommateur de justifier son acte par un manque de connaissance du sujet, tout en prétendant que son achat isolé ne contribuera en aucun cas au manque à gagner annoncé par les protagonistes de la véritable horlogerie suisse. Jusqu’ici, le combat anti contrefaçon a été appréhendé sur différents fronts : investigations, saisies, arrestations, fermetures de réseaux clandestins, etc. Sur ce plan, un travail assez considérable a été réalisé ces dernières années. Des campagnes d’intimidation sur les risques juridiques encourus par le consommateur lui-même ont ensuite pris le relai, suivies par des campagnes de sensibilisation aux préjudices causés à l’économie, aux marques et au marché du travail. Mais si l’on en croit les statistiques, l’ensemble de ces actions ne semble pas réellement pousser le consommateur à se retirer d’un marché en pleine expansion. Quels sont ces chiffres ? En 1982, la contrefaçon rapportait $ 5 milliards de chiffre d’affaires tous produits contrefaits confondus. Aujourd’hui, ce sont près de $ 250 milliards qui sont générés par un marché qui représente bien peu de risques en matière pénale pour les contrefacteurs comparé au trafic de drogues ou à d’autres activités criminelles connexes.
Crime et contrefaçon
Si, par le passé, cette activité frauduleuse n’attirait que des bandes organisées isolées, il en va tout autrement aujourd’hui. Sur les 17 organisations criminelles les plus importantes du globe, 14 d’entre-elles sont impliquées dans le trafic de contrefaçon (DVD, médicaments, horlogerie, vêtements, etc.). Cet argument n’est-il pas suffisant pour sensibiliser le public au type de marché qu’il entretient lorsqu’il achète du faux ? Précisons alors que 6 organisations sur les 17 sont également impliquées dans l’exploitation humaine, le blanchiment d’argent, les transferts de fond illégaux, la prostitution, le trafic de drogues et d’armes. Dans ce contexte, Internet est une façade très efficace lorsqu’il s’agit de détourner l’attention du consommateur. Il est effectivement peu probable que ce dernier s’inquiète de quoi que ce soit en surfant sur un site au design professionnel, présentant des produits contrefaits criants de vérité (sur les photos uniquement) et à des prix défiant toute « concurrence ». Le consommateur doit donc aujourd’hui prendre conscience des conséquences de ses actes d’achat avec un point de vue nettement plus large qu’une simple vue plongeant sur son tour de poignet. D’autant que les risques et les répercutions encourus, notamment d’un point de vue pénal, sont non négligeables aujourd’hui pour l’acheteur de faux, sans parler du danger consistant à devenir bien malgré lui la cible d’autres activités tout aussi répréhensibles.
Des mouvements de "qualité"
Si, auparavant, identifier une montre après ouverture du boîtier était chose facile, il en va tout autrement aujourd’hui. Les contrefaçons de mouvement ETA en nickel ont maintenant laissé la place à l’acier, au titane ou encore à la céramique. Non seulement ces mouvements contrefaits sont désormais montés à partir de matériaux solides et de qualité suffisante pour bluffer le consommateur, mais ils sont aussi assemblés de façon professionnelle et bénéficient d’un traitement machine digne des meilleurs fabricants. C’est ainsi qu’un détail, hier encore preuve évidente d’une contrefaçon, n’est plus discernable aujourd’hui, de sorte qu’il n’est pas rare pour certains modèles qu’une étude de l’acier en laboratoire professionnel soit nécessaire pour permettre l’identification d’une fausse montre. Ceci représente un véritable problème non seulement pour le consommateur et pour les marques mais aussi pour les revendeurs de montres de seconde main, de plus en plus nombreux sur un marché qui ne semble pas réellement souffrir de la crise. Les frais occasionnés par une véritable expertise en atelier par une marque de Haute Horlogerie peuvent en effet parfois dépasser la marge du revendeur, sans compter que les Maisons sont peu enclines à rendre service aux boutiques spécialisées dans les montres d’occasion. De quoi inquiéter plus d’un expert… F.G.
Les risques personnels
Si, auparavant, identifier une montre après ouverture du boîtier était chose facile, il en va tout autrement aujourd’hui. Les contrefaçons de mouvement ETA en nickel ont maintenant laissé la place à l’acier, au titane ou encore à la céramique. Non seulement ces mouvements contrefaits sont désormais montés à partir de matériaux solides et de qualité suffisante pour bluffer le consommateur, mais ils sont aussi assemblés de façon professionnelle et bénéficient d’un traitement machine digne des meilleurs fabricants. C’est ainsi qu’un détail, hier encore preuve évidente d’une contrefaçon, n’est plus discernable aujourd’hui, de sorte qu’il n’est pas rare pour certains modèles qu’une étude de l’acier en laboratoire professionnel soit nécessaire pour permettre l’identification d’une fausse montre. Ceci représente un véritable problème non seulement pour le consommateur et pour les marques mais aussi pour les revendeurs de montres de seconde main, de plus en plus nombreux sur un marché qui ne semble pas réellement souffrir de la crise. Les frais occasionnés par une véritable expertise en atelier par une marque de Haute Horlogerie peuvent en effet parfois dépasser la marge du revendeur, sans compter que les Maisons sont peu enclines à rendre service aux boutiques spécialisées dans les montres d’occasion. De quoi inquiéter plus d’un expert… F.G.
Les risques personnels
Ces trois dernières années, la phobie de l’escroquerie à la carte bancaire a grandement diminué. Les sites commerciaux ont effectivement mis en place des systèmes sécurisés efficaces et la pratique du paiement en ligne s’est largement démocratisée. Mais ces adresses Internet sont des sites de confiance. Ce qui ne veut pas dire qu’il faille se fier à n’importe quelle vitrine en ligne. Le crime organisé a d’ailleurs très rapidement découvert qu’il pouvait facilement jouer sur le facteur confiance. Une nouvelle opportunité qui recouvre une nouvelle activité frauduleuse, à savoir la collecte de coordonnées bancaires. Mettre l’internaute en confiance n’est plus chose compliquée. Le simple fait de mettre en ligne une boutique très bien présentée, arborant les logos des plus grandes marques ainsi que les pictogrammes bancaires d’usage montrant que le site est « sécurisé », suffit généralement pour apaiser les doutes. Ces boutiques de façade masquent en fait une véritable activité criminelle très bien organisée et dont le but premier est la collecte d’informations bancaires. Et pour rendre la démarche d’autant plus crédible, ces sites commercialisent de véritables produits, commandés, expédiés, livrés et, pour couronner le tout, de qualité. De nombreux consommateurs en ont déjà fait les frais.
Un système bien huilé
Trois étapes suffisent pour mettre en route un système huilé à la perfection, système qui va permettre d’alimenter le crime organisé aux quatre coins du globe. Après avoir consulté les nombreuses pages d’un site de montres contrefaites, l’internaute passe sa commande. Celle-ci est validée, l’argent encaissé, le produit préparé et expédié. Dans les six jours, le consommateur reçoit donc son produit pour autant qu’il passe les mailles du filet douanier. Le client est satisfait : pour lui, la transaction est close. Or il n’en est rien. Il vient en fait de donner ses coordonnées bancaires à une organisation qui va les redistribuer à des tiers. Pour mieux noyer le poisson, ces informations ne seront utilisées que plus tard, lors d’une même journée, dans le cadre d’achats à des sociétés implantées dans différents pays et dont les propriétaires sont les responsables d’organisations criminelles importantes. Achats financés par des ponctions effectuées sur les comptes dont les coordonnées ont été collectées, évidemment sans le consentement de leur détenteur.
A ce moment, il déjà trop tard : le temps a joué en défaveur du consommateur. Vu le nombre de transactions passées en une seule journée, la possibilité d’en retracer l’origine est minime d’autant qu’elles s’effectuent dans une multitude de pays différents et que les montants sont généralement peu importants. Pourchasser ces organisations est la tâche de la police et des services d’investigation internationaux. Ils y travaillent d’ailleurs d’arrache-pied comme le démontrent les résultats obtenus ces deux dernières années. Le rôle du consommateur, quant à lui, est simplement de ne pas se laisser tenter par ces produits frauduleux et de boycotter le faux. F.G.
Sem comentários:
Enviar um comentário