En un mot, personne avant le chancelier Bacon n’avait connu la philosophie expérimentale ; et de toutes les épreuves physiques qu’on a faites depuis lui, il n’y en a presque pas une qui ne soit indiquée dans son livre. Il en avait fait lui-même plusieurs ; il fit des espèces de machines pneumatiques, par les- quelles il devina l’élasticité de l’air ; il a tourné tout autour de la découverte de sa pesanteur ; il y touchait ; cette vérité fut saisie par Torricelli. Peu de temps après, la physique expérimentale commença tout d’un coup à être cultivée à la fois dans presque toutes les parties de l’Europe. C’était un trésor caché dont Bacon s’était douté, et que tous les philosophes, encouragés par sa promesse, s’efforcèrent de déterrer.
Mais ce qui m’a le plus surpris, ç’a été de voir dans son livre, en termes exprès, cette attraction nouvelle dont monsieur Newton passe pour l’inventeur.
« Il faut chercher, dit Bacon, s’il n’y aurait point une espèce de force magnétique qui opère entre la terre et les choses pesantes, entre la Lune et l’Océan, entre les Planètes, etc.
En un autre endroit, il dit : « Il faut ou que les corps graves soient portés vers le centre de la terre ou qu’ils en soient mutuellement attirés, et, en ce dernier cas, il est évident que plus les corps, en tombant, s’approcheront de la terre, plus fortement ils s’attireront. Il faut, poursuit-il, expérimenter si la même horloge à poids ira plus vite sur le haut d’une montagne ou au fond d’une mine ; si la force des poids diminue sur la montagne et augmente dans la mine, il y a apparence que la terre a une vraie attraction.
Voltaire, Cartas Filosóficas, Décima segunda carta sobvre o Chanceler Bacon
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